Richard, en 2020 vous êtes nommé Manager de l’équipe Française Esport Renault F1-Team et vous décidez d’engager une réflexion globale autour des déterminants de la performance dans votre discipline. Vous ciblez notamment l’entraînement cognitif comme un axe important de votre programme Performance. Quelle drôle d’idée ?

 » L’entrainement cognitif m’a été introduit dès 2018 par Julien Southon. Julien est consultant en psychologie du sport et fondateur de Sport Your Brain, une structure spécialisée dans l’entraînement cognitif des sportifs de haut-niveau. Lorsqu’il m’a présenté ses travaux de recherche et ses méthodologies de travail et d’intervention, ça m’a tout de suite parlé. J’ai pu rapidement faire les liens avec notre activité et projeter les bénéfices qu’un tel entraînement pouvait apporter en matière de performance pour nos pilotes. Quand je suis arrivé au management de l’équipe virtuelle Renault F1 Team, j’ai repris contact avec lui afin que l’on puisse travailler ensemble. C’est ainsi que l’aventure a démarré à l’été 2020. »

Pouvez-vous nous en dire davantage sur ce programme d’entraînement innovant que vous avez mis en place au sein de Renault F1-Team ?

« Concrètement, la collaboration avec Sport Your Brain correspond à quatre mois de travail intensif pour nos pilotes de F1 Esports. Nous avons débuté le programme un mois avant les premières courses, pour le finir en décembre 2020. Le protocole d’entraînement cognitif était composé de trois séances hebdomadaires, hors période de courses. La séance durait environ 30 minutes et ciblait directement les capacités visuo-attentionnelles de nos trois pilotes. »

Comment ce programme d’entraînement inédit a-t-il été accueilli par vos pilotes ?

 » Ils étaient plutôt curieux de réaliser ce genre d’entraînement. Pour rappel, nous avons travaillé en 2020 avec de jeunes pilotes donc à partir du moment où il y a une forme de gamification, on arrive à susciter leur intérêt. Ils se sont bien prêtés au jeu ! Les exercices leur ont plu et ils ont rapidement perçu les bénéfices qu’ils pouvaient tirer de cet entraînement en termes de performances en matière de pilotage. J’avais personnellement testé les outils en amont afin de voir ce que ça donnait pour pouvoir me projeter et ainsi faire le relai vis-à-vis des pilotes. Je voulais leur introduire ces technologies de manière pertinente pour qu’ils les intègrent au quotidien et que cela devienne naturel. C’est important pour un entraîneur de trouver sa place au sein d’une équipe et la relation avec Julien a été extrêmement facile. Avec moi, en tant que Manager, mais aussi avec les pilotes. Ils ont toujours été demandeurs et à l’écoute de ses conseils, qui étaient pertinents. »

Quel bilan faîtes-vous de ce programme d’entraînement cognitif ?

« Deux choses m’ont rapidement marqué. Cet entraînement cognitif nous a donné un très bon aperçu de la hiérarchie au sein des pilotes, en termes de potentiel. Ça s’est révélé plus précis que je ne l’imaginais. Ensuite, ce travail a été un facteur non négligeable des performances de l’équipe. Comme dans tout sport de haut niveau, il y a des situations d’urgence à gérer, des moments sous haute pression. Je pense que l’apport du travail de Sport Your Brain a contribué aux bons résultats d’ensemble de l’équipe, qui termine 3e du Championnat du Monde des constructeurs et aux deux victoires de Nicolas Longuet. »

Allez-vous poursuivre ce programme pour cette nouvelle saison ?

« Oui bien entendu. L’idée pour cette saison est de poursuivre ce que l’on a déjà mis en place tout en affinant le dispositif. J’aimerai pouvoir également intégrer ce travail dans le processus de recrutement des pilotes, en amont de la saison. On n’avait pas pu le faire l’an dernier mais c’est vraiment un outil que je veux utiliser pour sélectionner nos pilotes. On veut trouver d’éventuelles prédispositions, grâce au profilage cognitif réalisé par Julien, qui feront de ces talents, de futurs champions. »

Propos recueillis par Josselin Riou – Journaliste Sportif